Un beau récit de Jean-Louis (actuellement en préparation pour les championnats du monde X-Terra d’Hawaï de novembre) qui a terminé le Roc d’Azur, au mental :
« Cela fait des années que je souhaitais participer à cette épreuve mythique et dès l’ouverture des inscriptions en janvier, je saute sur mon clavier afin d’être sûr d’y participer car cette course est limitée à 5000 concurrents. Voilà, c’est une bonne chose de faite. Pourquoi, je ne resterai pas sur une saison triathlon plus fun et plus nature. Il y a une douzaine d’années je m’étais engagé sur des triathlons verts de l’époque et des défis verts (courses orientations VTT et CàP sur deux jours avec épreuve de nuit). Cette interrogation m’incite à voir du côté de l’ XTerra (1500m de natation, 33 à 40km de VTT et 10 à 11km de trail), je franchis le pas en m’inscrivant à l’XTerra France à Xonrupt dans les Vosges. Le Roc se dispute début octobre, l’Xterra début juillet par conséquent j’aurais tout l’été pour me préparer. Mais, que vais-je faire avant Xonrupt, par les hasards de la vie le petit-neveu de Claudette est également engagé à Xonrupt, en Belgique à Namur et en Espagne. Ni une ni deux, je m’inscris pour Namur début juin. Mon programme de cette année est ainsi défini en laissant pas mal de place pour d’autres courses.
Le résultat des courses, c’est que mon classement me fixe un autre objectif trois semaines après le Roc d’Azur, j’ai mon slot pour Xterra Word à MauÏ à HawaÏ. Très peu d’hésitation et je crame la carte bleue d’une somme en dollars……..
Dois-je faire le Roc ou pas ? En fait, 56km c’est une bonne préparation à la vue des 33km de Mauï. Les dés sont jetés il ne me reste qu’à bien m’entrainer pour Roc, je le fais en faisant des sorties VTT longues de 50 à 70km dans les forêts autour de Conflans en poussant l’itinéraire au-delà de Oinville sur Moncient par les chemins et évidement l’Hautil. Je cours également la première édition des 4h00 de Séraincourt réduit à 3h30 suite à l’usure de certains compétiteurs. Je réalise la dernière sortie longue avec Jérome alias Popkorn qui m’accompagne sur les 65km en 3h30 ceci la semaine avant le Roc. Mes cuisses sont un peu contractées à la fin, mais c’est une sortie faite en endurance, pour ma part une barre énergétique et un bidon d’eau sont consommés, en fait pas grand-chose. Ces repères sont importants afin de bien gérer le Roc.
Ha ! Enfin je récupère ma plaque N°3281 vague 7, j’aurais préféré les vagues précédentes mais bon c’est comme ça……..Je passe sur les détails de pré-course.

Je suis prêt
La Base du départ se trouve à une dizaine de kilomètres de l’hébergement, je pars donc assez tôt afin de ne pas être bloqué dans la circulation et de faire monter le stress pour rien.
Le départ de la première vague est à 9h30 le mien à 11h, du coup j’arrive sur la base sans encombre plus tôt que prévu et cela me permet de voir le départ de la vague 1. Un vrai délire, 600 mecs qui pédalent à fond dans un nuage de poussière, les premiers sont déjà à 500m que le dernier part. La zone de ‘lancement’ est large sur au moins un kilomètre et ce réduit à deux de front ensuite, tout s’explique, à moi d’en tirer des conclusions pour mon départ est dans une heure. Je me présente rapide vers mon sas de départ afin de ne pas être en fin de peloton ceci dans le but de partir près des premiers de ma vague, c’était ma décision vu le start de la vague 1.

Maintenant j’attends le départ
5 4 3 2 1 feu, c’est parti vite je reste sur le bord, ne pas être enfermer dans ce nuage de poussière, je me laisse distancer et reste au contact à une vingtaine de mètres et aborde la piste réduite dans le flux ouf, ça c’est bien géré pas de freinage. J’aborde la partie roulante de 3 km avant les premières difficultés en toute tranquillité sans pression des autres concurrents tout le monde est à sa place et il n’y a pas de heurte il reste 53km à faire !
Je rattrape les derniers de la vague précédente avant le premier ravitaillement, il y a 6 sur le parcours.
Je me suis fixé une stratégie pour mon alimentation au cours de cette épreuve, je pars avec 1 bidon d’eau, 2 gels et 3 gateaux sec ‘petit prince’. A ce ravitaillement, je bois vite fait 2 verres de menthe à l’eau bien sucrés, sur le ravito 2 et 3 je fais de même.
Les grandes montées et descentes se succèdent, c’est le Roc mais une m‘a vraiment estomaquée, il s’agit de descendre la montagne, y a t-il un chemin? Mais, il n’y a plus de terre ni de végétation que des traces de pneus et de chaussures et là houai ! ca cause, je m’engage, j’ai le ventre sur la selle, je passe entre les ornières, les blocs de rocher, j’évite de freiner à la fin de chaque passage de rocher afin de ne pas passer par-dessus le vélo de la technique pure. Durant cette descente je crie « attention je passe à droite, je passe à gauche, au milieu » en bas je regarde le parcours descendu, il n’y a qu’un vététiste sur 3 qui est sur son vélo, au put…..je crois que si j’avais croisé cet obstacle hors course, j’aurais renoncé et je pense avoir repoussé mes limites mais mon nouveau vtt a dû m’aider.
Le trafic est plus dense, quelques bouchons se forment dans des parties délicates ceci se révèle un bien pour moi, j’ai moins d’effort à fournir, je roule moins et prends moins de risque en phase descendante il y a toujours un ‘guide’ devant.
Aux ravitaillements 4 et 5 je consomme 2 verres de boisson énergétique, une barre et un carré de chocolat, je ne ressens aucun manque.
Avant le coup de cul final du col de Bougnon, j’ai la surprise de voir Claudette m’encourager, elle s’est fait la montée de 3 km à pied, à chacun son défi ! Je passe ce col à 35km en 2h42 malgré les embouteillages et l’attente de l’évacuation d’un concurrent par hélicoptère. Il ne reste que 21km pour finir et j’ai toujours des jambes c’est super.
Tout se complique en arrivant au ravitaillement 6 le dernier, après une légère dépression de terrain et sur l’élan de celle-ci je me rassois tranquille sur ma selle et là, le devant du vélo s’effondre et se plante net je vole par-dessus le guidon et douleur horrible me transperce. C’est con à avouer, mais ma première inquiétude était celle d’être forfait pour XTerra Mauï. La raison a vite fait de reprendre le dessus, je me relève, j’ai mal l’épaule droite et aux côtes je respire à fond, je tourne le bras autour de l’axe de l’épaule tout répond, les gars s’arrêtent et prêts à prévenir les secours. Après cet autodiagnostic je remonte sur le vtt et je finis cette légère pente jusqu’au ravitaillement. Je prends mon temps afin de récupérer ce choc et de m’assurer sur ma forme physique. Ce n’est pas la première gamelle de ce genre que je prends, j’ai un certain ‘retour de mauvaise expérience’ avec presque cinquante ans d’activité sportive. Je repars il reste environ 8 ou 9 km pour finir dont 3 plats finaux, donc pas de souci majeur, à par le mental et la douleur de l’épaule. En fait, cette partie finale n’est qu’une succession de petites montées et descentes raides de 200m, j’arrive à les monter sans problème, cela devient compliqué dans l’autre sens, l’appui sur le guidon, le serrage des freins et les chocs accentuent la douleur. Je suis contraint de mettre à pied à terre plusieurs fois et de laisser passer les autres qui ne comprennent pas ce qui m’arrive. J’arrive enfin sur la partie finale, c’est roulant, c’est plat, je roule, je double, je vois la fin du calvaire encore 200m un mec me double et je finis en sprint. Mais pourquoi ?

Voilà à quoi ressemble un finisher du ROC d’azur.
Pour conclure, je termine en 4h32 à la 2218ème place sur 5000 engagés, je n’ai aucune douleur musculaire au niveau des jambes après course, je n’ai eu aucun manque durant celle-ci, je n’ai pratiquement pas vu le paysage et j’ai toujours des reflex du type pancarte.
J’écris ce récit après 4 jours, j’ai passé des radios, je n’ai rien de cassé mais le radiologue m’a dit avec un petit sourire : « vous avez l’épaule un peu désorganisée » La suite en novembre »
Jean-Louis Cousté